Les défis en matière d'emploi et de financement de la sécurité sociale et des pensions

Séance plénière du 15 septembre 2004

François-Xavier de Donnea (MR): Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, ma carrière parlementaire m'a appris que les discours les plus courts étaient les plus populaires, sinon les meilleurs, et donc je serai très bref. Je vais me contenter de faire quelques brèves remarques sur quelques aspects budgétaires et économiques du vieillissement et M. Bogaert m'a conforté dans les remarques que je vais faire.

Je crois tout d'abord que, et on ne l'a peut-être pas souligné suffisamment ici aujourd'hui, les défis que nous devons relever en raison du vieillissement de la population sont bien davantage des défis économiques, concernant l'allocation efficace de nos ressources en matière de travail et de capital, que des défis purement budgétaires. Il faut évidemment suivre les recommandations du Conseil supérieur des finances et du Comité d'étude sur le vieillissement concernant les surplus budgétaires à réaliser, les fameux 1,5% à l'horizon 2010 et au-delà. Nous devons bien sûr constituer et surtout continuer à alimenter un fonds du vieillissement. Et nous devons aussi, madame De Block, investir éventuellement et encourager les gens à investir dans des deuxième et troisième piliers pour se constituer des réserves financières. Mais il ne sert à rien de constituer des réserves financières au niveau de l'Etat, des individus et des collectivités, si l'appareil économique n'est pas à même de produire, à l'avenir, d'ici à 2030 chaque année, une masse de biens et services au moins équivalente à celle que nous connaissons actuellement. Sinon la dépense des réserves financières et budgétaires que nous aurons constituées à titre collectif ou à titre privé ne feront qu'alimenter soit les tendances inflationnistes, soit des déficits de la balance des paiements et, finalement, le niveau de vie et le degré de protection sociale que nous voulons assurer aux gens diminuera quand même. Ce qui compte, c'est l'économie réelle, ce n'est pas l'économie financière. Donc, il est clair qu'il faut que l'Etat gère rigoureusement son budget. Il est clair que nous devons  constituer des réserves financières dans un fonds de vieillissement. Mais il est tout aussi clair que si ces réserves sont purement financières et ne sont pas contrebalancées par une production de biens et de services suffisants, que nous achèterons de moins en moins de choses avec de plus en plus d'argent, ce qui s'appelle l'inflation. Evidemment, ce qui vaut pour la Belgique vaut également à l'échelle de l'Europe.

Le grand défi de l'Europe de demain sera sa capacité de continuer à produire une masse croissante de biens et services de façon à assurer une prospérité de l'ensemble des générations - que ce soit celle des gens actifs ou celle des pensionnés qui, d'ailleurs, ne peuvent vivre que parce qu'il y a des actifs qui produisent des biens et services répartis entre actifs et non-actifs d'une façon, je l'espère, de plus en plus équitable. Je crois que c'est cela qu'il faut dire. Donc, monsieur Bogaert, la question de savoir si le déficit sera de 1,5; 2,5 ou 5% du PIB n'a - dans le fond - pas d'importance. Nous savons que nous allons vers un déficit. Nous savons que nous devons mobiliser l'appareil de production. Et bien, mobilisons à fond cet appareil de production: investissons dans l'enseignement, améliorons sa qualité, investissons dans la recherche-développement, investissons dans l'appareil productif, améliorons la flexibilité et l'efficacité du marché du travail, incitons les gens à travailler et à augmenter le taux d'activité. C'est tout cela qu'il faut faire. Et faisons cela le mieux possible. A ce moment-là, nous rencontrerons au mieux le défi du vieillissement. Nous ne le rencontrerons peut-être pas totalement; peut-être une certaine réduction du niveau de vie se produira-t-elle en raison du vieillissement.

Mais ce n'est qu'en mobilisant à 100% notre appareil productif que nous pourrons, en termes d'économie réelle, réduire le plus possible l'écart entre la croissance que nous souhaiterions et celle que nous pourrons effectivement réaliser. Donc, pour conclure, monsieur le président, et je ne serai plus long: rigueur budgétaire, oui; Fonds de vieillissement, oui. Mais tout cela ne servira à rien si nous ne mobilisons pas notre appareil économique. Et, pour ce faire, peu importe de savoir exactement quel sera le déficit. Nous devons vraiment foncer pour mobiliser nos ressources et éviter ainsi à terme non seulement une diminution du niveau de vie et de protection sociale; mais peut-être pire encore: des tensions très graves entre générations et une destruction de la cohésion sociale.